Lettre à mes ami(e)s  et  ex-collègues de travail

Des rires et de la joie, des douleurs et de la souffrance.

 

On dit souvent " rire aux larmes ", quel joyeux paradoxe. En énonçant cette expression, on a l'impression que la frontière est mince entre ces deux mots, symboles de joie  et de souffrances. Nous venons au monde en pleurant après avoir baigné dans la  chaleur maternelle. Nourrisson, notre vie est partagée entre les coliques, les fièvres répétées, le sein chaleureux et les câlins affectueux de nos proches. Nous grandissons dans une succession de plaisirs et de peines provoqués soit par nous, soit par  les événements de la vie  et la lecture  que nous en faisons. Avons-nous le privilège de choisir entre rires et pleurs, entre plaisirs et douleurs, entre malheur et bonheur, entre joie et tristesse ?

Les anciens de l'antiquité,  les orientaux et  les indiens étaient  assez stoïques devant la fatalité. Quand on croupit dans la misère, la guerre, la pauvreté, la famine il est bien difficile d'être heureux. Par contre, bien des peuples qui vivent dans la pauvreté, savent bien plus que nous, sourire à la vie. Le bonheur ne s'achète pas. On peut acheter des soins de santé, des cures apparemment  miraculeuses, mais la santé en soi ne s'achète pas, même si la richesse peut la favoriser. Toutes les personnes atteintes du cancer ou de maladies incurables, qui ont le goût de vivre, donneraient bien un, deux et même dix millions pour recouvrer la santé. Mais encore là, la santé physique et l'argent ne suffisent  pas si la vie est dénuée d'amour, si elle n'a pas de sens, si tout tourne  autour  de l'avoir et du paraître.   

On peut acheter le rire par des spectacles d'humour, mais ceux-ci terminés, si la joie du cœur est tarie, tout s'envole en fumée, comme un feu  de paille. La joie non  plus ne s'achète pas, elle se cultive comme un jardin qu'on ensemence en l'arrosant chaque jour  des graines d'amour et en débroussaillant les mauvaises herbes de tous les ressentiments négatifs qui nous contaminent. À une mère inconsolable dont la fille s'est suicidée , voici ce que j'ai osé lui écrire : " Laissez entrouverte la porte de votre jardin, où s'élève au plein milieu, la stèle  d'une enfant dont la  vie, comme un vase de  cristal, vous a échappé de vos  mains aimantes mais impuissantes à la retenir. Au fil des jours, semez dans  ce jardin des graines de joie qui sous l'effet de vos larmes et de votre amour, donneront naissance à de magnifiques bouquets de fleurs qui un jour égaieront votre cœur " Notre vie n'est elle pas parsemée de deuils dont chacun pourrait entraîner l'effondrement permanent  de notre  joie ?

La douleur est au rire ce que la souffrance est à la joie. La douleur émerge d'une partie du corps blessée accidentellement  ou affligée par la maladie, tandis que la souffrance c'est la blessure de l'âme impuissante à composer avec sa douleur ou son mal de vivre. La moindre douleur physique se transforme en souffrance pénible  lorsqu'il y a non acceptation de ce qui  nous arrive. C'est souvent le  mental qui transforme la douleur en souffrance. Lorsque le  mental est affecté, il suscite toute une gamme d'émotions comme la colère, la tristesse, la déprime et la perte du goût de vivre. Toutefois, dans toute perte affective,  il  y a  inévitablement souffrance et, un long processus de deuil est inévitable. La maturité s'acquiert dans les deuils. Comme  intervenants ne devez-vous pas faire le deuil de votre toute puissance à vouloir  régler tous les problèmes de la clientèle, à vouloir corriger toutes les injustices, à combler  tous les  déficits affectifs ?

Le mal de vivre conduit souvent à risquer sa vie et celle des autres dans des comportements insensés, tandis que la soif de vivre nous pousse à faire de douces et saines folies. Quand je demande à mon ami  Vallier ( porteur de métastases au foie et au pancréas) qui vient de s'acheter un campeur, s'il a l'intention de faire un Grand Voyage, il ne peut s'empêcher de  rire, car il porte en lui la joie de vivre. D'ailleurs la joie et la peine peuvent cohabiter quand elles reposent sur un lit de paix intérieure. J'oserais appeler cela de la sérénité devant l'adversité. Nous pouvons alors parler librement, à la fois de notre  mort annoncée (par les médecins et leurs statistiques) ainsi que  de nos projets et de nos espoirs. " Cet été tous mes petits voyages seront de grands voyages " dixit Vallier.

De toute façon, comme  nous sommes des êtres de finitude, toute mort est annoncée,  mais nous nous comportons souvent comme des créatures dont le  corps est immortel. Il ne s'agit pas de vivre dans  la hantise de la mort, mais dans le respect de celle-ci, comme dans celui de la vie. Là dessus Sénèque écrit à son ami Lucilius : " La mort devrait être devant les yeux du jeune homme autant que du vieillard : il n'y a pas d'ordre de passage, pas de priorité pour les personnes âgées. Il nous faut donc régler chaque journée comme si elle devait fermer la marche, mettre un terme à notre vie ". Alors, faisons la liste de ceux et celles que nous affectionnons particulièrement et disons leur le plus souvent possible que nous les aimons.

Comme ma liste serait un peu longue à énumérer,

je vous dis à toutes et à tous ; "Je vous aime ."

Guillaume 06-2002

((((Note de PAPEMICH ::::Si vous avez le goût,vous aussi, chères lectrices, chers lecteurs, de dire à Guillaume que vous l'aimez, que vous appréciez ses beaux textes, envoyez un courriel ,sujet "Mon cher Guillaume"  à  :  papepoete@pape.ifitsa.com        Je me ferai un devoir de lui  transmettre.  Cela serait vraiment gentil ))))

                                                                   

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